Le malade imaginaire à rayures

Quel que soit le mot utilisé, que l'on prenne surdoué, EIP, enfant à haut potentiel intellectuel, la plupart des gens y voient là un "plus". En terme d'intelligence bien sûr... & d'ailleurs bien souvent, uniquement en terme d'intelligence :!:

Ces expressions appellent inévitablement une notion surnuméraire qui dans l'esprit de beaucoup se traduit par une évidence de réussite scolaire, de facilité d'apprentissage dues à une intelligence supérieure sur un plan quantitatif. Le surdoué, c'est finalement l'intello (terrible insulte dans les cours d'école...), avec toute la panoplie qui va bien :-P

 

Quiconque s'intéresse pourtant réellement au sujet de la douance sait qu'un enfant à haut potentiel intellectuel n'est - non seulement - pas nécessairement un premier de la classe binoclard (pour rappel : 1/3 d'entre eux est en réelle réussite, 1/3 obtient des résultats plutôt moyens & 1/3 est en total échec scolaire & même le 1/3 en réussite scolaire ne tourne pas forcément à 19 de moyenne, caché derrière de grosses lunettes rondes. Bref...) ; mais surtout qu'il n'est pas que "plus intelligent".

 

Le "plus intelligent" étant lui aussi à revoir :arrow: on sait aujourd'hui qu'il est essentiellement intelligent de manière non conventionnelle par rapport à la moyenne des individus.
Depuis déjà quelques années déjà, les spécialistes ont mis en évidence le fait que dans le surdouement, il est fortement question d'une intelligence qualitativement différente, pas uniquement une différence sur un plan quantitatif. Je précise néanmoins que cette différence quantitative demeure malgré tout un minimum présente, soyons honnête. Elle se manifeste notamment par des scores de 2 à 4 écarts-type au dessus de la moyenne, c'est un fait. Il y a donc bien un plus à ce niveau-là aussi...mais pas que :!:

 

Car la vrai question est ailleurs. Dans la pensée commune, cette différence ne se manifeste donc qu'en terme de performances scolaires découlant d'une plus grande intelligence. Cependant bien d'autres domaines sont effectivement concernés par un "plus", la différence ne se bornant pas à des capacités de travail plus importantes sur un enfant identique en tous points aux enfants dans la norme.
Ce n’est pas tant le fait d’être scolairement en avance sur les autres qui caractérise un petit zèbre, mais ses particularités de fonctionnement intellectuel & l'intégralité de son mode de pensée qui sont différents.

 

Dans la vie d'un petit zèbre & de sa famille, les "plus" ne se limitent pas à la vie purement scolaire, bien loin de là ! Généralement bien éloignés des images constituées par les habituels préjugés sur le surdouement, on trouve par exemple chez tout zébrillon :

 

• (beaucoup) plus de besoin d'être rassuré perpétuellement, d'être aimé

• (beaucoup) plus de lucidité sur le monde qui l'entoure

• (beaucoup) plus de sensibilité (un rien crée un drame intérieur...)

• (beaucoup) plus de difficultés à se sentir compris des autres

• (beaucoup) plus d'envie de comprendre comment fonctionne le monde dans lequel il vit

• (beaucoup) plus de somatisations

• (beaucoup) plus d'angoisses liées aux questionnements sans fin

 

 

Si un enfant HQI ou THQI n'est pas handicapé (la surefficience intellectuelle n'est ni une pathologie, ni une tare ; seulement une spécificité) ; il est hypersensible & donc, beaucoup plus fragile.

Nathalie Thiebaut, présidente de l’association lorraine EHPI (enfants à haut potentiel intellectuel) déclare à ce propos dans un très court article paru dans l'Est Républicain le 23 octobre dernier :

 

Ils vivent dans l’émotionnel. S’ils ont une maîtrise très tôt du langage oral, ils peuvent souffrir de troubles de l’attention, avoir quelques difficultés en motricité fine. C’est comme avoir un cerveau d’une Ferrari dans un corps de 2 CV. Ces enfants, se posent beaucoup de questions, surtout lorsqu’ils sont petits, car il faut comprendre cette différence.

 

 

Ces angoisses couplées à l'hypersensibilité qui les caractérise ont aussi bien souvent pour conséquence une hypocondrie très poussée, une anxiété considérable pour tout ce qui touche à la santé (& par extension, à la mort) :oops:

 

 

Le zébrillon a toujours eu une tendance "malade imaginaire", ce n'est pas nouveau. Tout petit déjà, il était très facilement angoissé à l'idée d'avoir une quelconque maladie, un quelconque problème que lui seul ne verrait.

Depuis quelques semaines pourtant, cette tendance s'est renforcée & les crises s'accentuent, se faisant nettement plus fréquentes & plus intenses.
En ce moment, pas un jour ne se passe sans qu'il ne soit persuadé d'avoir quelque chose de grave 8-O Il arrive aussi que nous soyons confrontés à 2 ou 3 "cas" dans la même journée...

 

Cela va de la crise cardiaque (je sais, ça peut faire sourire  :!: Surtout quand votre zébreau âgé de 7 ans vous annonce ça d'un air grave, mais bien évidemment sans aucun signe extérieur inquiétant), à l'attaque de champignons tueurs (dans la cour de l'école), sans oublier la mort par asphyxie causée par un bout de kleenex "avalé", & lui-même appliqué sur la gencive qui saignait & devait donc avoir également un important souci  :hypno:
Sans oublier les vérifications régulières de température (les thermomètres frontaux sont une belle invention n'est pas !?), les questions sur un ton innocent à propos des conséquences d'un geste qu'il aura identifié comme correspondant à une mise en danger caractérisée, etc.

 

Il est difficile (pour ne pas dire impossible !) de raisonner une peur qui, par définition, est hors de toute logique. Comment rassurer dans ces cas-là, comment aider son petit quand, qui plus est, on se souvient soi-même d'épisodes de panique à l'âge de 5 ans durant lesquels on croyait dur comme fer à sa mort avant l'âge de 7 ans, se pensant fragile du cœur car arrivant à entendre & ressentir les battements de ce dernier ?
Comme je le dis souvent, les zèbres ne font pas des chevaux :-|

 

Une chose est certaine, avoir un enfant surdoué équilibré nécessite un engagement parental largement supérieur à celui qui serait certainement suffisant pour un enfant dans la norme :round:
Si les zébrillons sont des enfants à la sensibilité exacerbée, il faut bien comprendre que les parents, de leur côté se doivent d'être beaucoup plus présents, beaucoup plus à l'écoute, pour ne pas dire capables de devancer ces crises d'anxiété aiguës, qui peuvent parfois prendre des proportions incroyables.

 

L'expérience m'a appris à prendre beaucoup plus de précautions dans chaque conversation, chaque épisode de vie, à manifester beaucoup plus de preuves d'amour face à ce petit être en devenir qu'un rien questionne & inquiète.
Ces interrogations continuelles amènent souvent les EIP dans des terres inconnues & qui peuvent s'avérer être source de grand stress. Etre attentif, savoir écouter les incessantes questions, y répondre le plus précisément possible, quelles que soient les circonstances est le quotidien des parents d'enfants doués ! Mais cela peut être à double tranchant.

 

Il arrive que l'on ne prévoit pas tout & qu'une parole anodine dans l'instant soit reprise à son compte par le zebrounet, plus tard (car rien ne se perd dans l'esprit du jeune zèbre LOL ) ; amenant ainsi de l'eau à son moulin dans la crise d'hypocondrie. Il n'aura alors plus qu'à aller puiser dans l'arborescence de sa mémoire les éléments adéquats pour valider ses peurs & le tour sera joué.
Magnifique exemple s'il en est : le sel dans les pâtes. Une simple mise en garde à table sur le fait de ne pas trop saler un plat... les questions qui viennent immanquablement avec... les explications que l'on donne naturellement (trop de sel c'est dangereux pour la santé, cela cause une augmentation de la pression artérielle, entraîne également des problèmes cardiovasculaires)... & le repas reprend, l'air de rien. Et un jour, alors que vous n'y pensez plus, le zébrillon est catastrophé, vous voyez à sa tête qu'il est en crise d'angoisses. Vous lui demandez ce qu'il a & pour seule réponse il vous demande la mine déconfite :

 

 Au bout de combien de temps meurt-on quand on a mis trop de sel ?

 

Ça peut bien sûr prêter à sourire. Le premier réflexe est de prendre ces inquiétudes à la légère. Inquiétudes qui à nous, adultes rationnels, nous paraissent bien infondées & donc presque risibles. J'ai pourtant pu constater que bien qu'irraisonnées, elles sont bien réelles pour le zebrounet et source de grande anxiété qui peut avoir bien du mal à retomber.
Les petits zèbres (comme les grands du reste... :-D ) sont souvent dans l'excès, dans les extrêmes. Trouver un juste milieu n'est pas leur fort & de nature, ils sont généralement plus enclin à se situer à l'une ou l'autre des extrémités de l'échelle du bien-être intérieur, souvent assez loin de la zénitude.

 

 

Tags: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,

8 commentaires à “Le malade imaginaire à rayures”

  1. gene dit :

    wilfried a eu cette période et puis ça y est passé . En ce moment , c’est les mots . Il a fallu que je lui fasse un cours sur les différents niveaux de langage , soutenue , familier , argot . Comment un mot peut suivant le langage dire une chose ou une autre … chercher dans le dico , sur internet … Ces enfants là ne se contentent pas d’une simple réponse , ils veulent des explications et ça peut durer des heures ou des jrs , ça dépend du sujet . En tant que parents , ça peut être très difficile à assumer mais on y arrive . C’est une question de motivation . L e gros problème c’est quand même l’école . Actuellement j’achète des tas de magazine pour tromper l’ennui de Wilfried au collège . Il a des tas d’heure d’études et de profs manquants . Du coup il lit 2 à 3 magazines scientifiques . La réussite scolaire de ces enfants est un n° d’équilibriste permanent . L’année dernière , 18 de moyenne en français , pour le 1er trimestre de cette année , même pas 10 . Dans les autres matières , aucun problème , entre 15 et 18 . J’ai rencontré sa prof de français et là , j’ai compris . Elle n’a rien compris et ne veut surtout pas faire l’effort de comprendre , du coup ça passe très très mal avec elle . Longue négociation avec Wilfried pour qu’il comprenne d’abord sa méthode . J’ai obligé la prof à notifier sa méthode et ses attentes par écrit . Ca sert à Wilfried de fil conducteur . Ensuite j’ai mis en place avec Wilfried une stratégie pour pouvoir passer l’année au moins à la moyenne de la classe . On verra au 2ème trimestre , si ça marche ou on adaptera . La technique la mieux adaptée , yen a pas , juste le feeling et ne pas hésiter à proposer plusieurs pistes à l’enfant , avec leur système de pensée , ils arrivent à trouver eux même leur solution et c’est là que l’on voit toute leur « intelligence » mais ils ont besoin d’aiguilleurs et c’est nôtre rôle de parents même si c’est parfois épuisant . bon lundi

  2. unemaman dit :

    notre zébré nous a un jour fait hurler de rire un service entier de pédiatrie après ……examen ; 3 ans 1/2 au compteur et des hurlements : « faites quelque chose , mes parents  » puis devant l’ infirmière qui essayait de lui expliquer qu’ elle allait très bien s’ occuper de son intestin un peu rétentif : » pas vous , je veux un vrai médecin  » . Le doute sur ses capacités et son niveau de qualification ont un peu raffraîchi sa bonne volonté , la pauvre. Un pédiatre plus tard et cour d’ anatomie vicérale à l’ appui , le zèbre tout fier de son savoir s ‘est laissé soigner en retournant les radios dans tous les sens pour vérifier l’ exactitude du diagnostic et la légitimité de l’ intervenant ….. Plaisanterie mise à part , il vaut mieux éviter de rire de ce qui est pour eux une véritable angoisse de mort ( pour ma part , j’ avais une peur panique d’ attraper la petite vérole après avoir vu une reconstitution historique télévisée de la vie d’ Elisabeth d’ Angleterre , à 6 ans ….. mes parents ont vu cette angoisse mais je ne leur ai jamais avoué la cause ! ).Comme quoi , entre l’ analyse intellectuelle et le ressenti :-D !

  3. fannette dit :

    Je reconnais bien là mes Z… Même si souvent chez nous ce sont des maladies plus bénignes qu’ils imaginent heureusement. Mais ces enfants sont aussi (et trop même) à l’écoute de leur corps et il faut du coup parfois leur faire confiance.
    Exemple : Z.1er (3 ans 1/2 à l’époque et aucune idée de sa zébritude encore) se regarde le nombril (au sens propre!) et y voit un bouton. Il nous annonce « bon je vais que je vais faire une petite varicelle » . Nous regardons, sourions, et disons « à priori c’est un petit bouton, certainement de chaleur(plein été), pas d’inquiétude » et 2 jours après, il était couvert de boutons, avec une varicelle bien diagnostiquée! Il avait compris que la varicelle était contagieuse, une camarade de classe l’avait eue et les liens de cause à effet ont fait le reste!
    C’est l’exemple le plus parlant mais, j’ai appris depuis car cela s’est produit à plusieurs reprises à faire confiance à ses « diagnostics »…

  4. Séverine dit :

    Je rebondis sur ce que dit Fannette (« j’ai appris à faire confiance à ses diagnostics »): notre zèbre a très très souvent raison (sur la direction à prendre, la solution d’un problème pratique…) mais une fois sur deux… je ne l’écoute pas (et dois me confondre en excuses ensuite). Ainsi, alors que nous courions sur un quai de gare (il avait 8 ans) pour attraper un train, je fais monter les 3 enfants dans un wagon, il me dit « Maman tu es sûre que c’est le bon train? ». Moi je réponds avec arrogance « évidemment qu’est-ce que tu crois? » et nous voilà partis. Au final notre train était sur la voie parallèle et nous nous sommes retrouvés à 4 dans un train bondé, n’allant pas à l’endroit souhaité et sans place assise… :-), lus fiston disant « je l’avais bien dit! ».

  5. Mamzelle dit :

    Suis touchée par ton article. L’amour en filigrane…
    Bien sûr je me reconnais dans ces inquiétudes, moins aiguë pourtant.
    Et j’aime ton explication du HP, il correspond à ma vision de la chose….
    Merci

  6. Gorlanne dit :

    Une chose est certaine, avoir un enfant surdoué équilibré nécessite un engagement parental largement supérieur à celui qui serait certainement suffisant pour un enfant dans la norme :round:
    Si les zébrillons sont des enfants à la sensibilité exacerbée, il faut bien comprendre que les parents, de leur côté se doivent d’être beaucoup plus présents, beaucoup plus à l’écoute, pour ne pas dire capables de devancer ces crises d’anxiété aiguës, qui peuvent parfois prendre des proportions incroyables.

    D’accord à 200%, même si mon petit Z ne fait pas dans le syndrôme hypocondrique, il peut être terriblement angoissé. Il faut être très présent et à l’écoute pour désamorcer les crises ou les laissées s’exprimer en toute confiance.
    Je conseille un livre, pas spécifique aux zèbres mais très intéressant : Au coeur des émotions de l’enfant d’Isabelle Filliozat.

  7. Nuances dit :

    Je souris … à l’évocation de mon Zébre de 12 ans la dernière fois chez la pédiatre.
    Elle le connaît tellement bien (depuis tout ce temps) que parfois, elle me demande de passer après que je l’ai eue en ligne … juste pour le rassurer !
    Lors de notre dernière visite, il était branché « Ebola » et lui a fait lire la circulaire ministérielle qu’elle avait reçue pour le rassurer.
    Et il a tellement confiance en elle … que ça marche plutôt bien !!
    Au passage quelques sourires jaunes à tout l’entourage parfois tellement incompréhensif qui nous accable … c’est bien connu s’ils sont aussi anxieux de tous les dangers c’est que nous, leurs parents, sommes tellement anxieux et surprotecteurs !

  8. Melanie dit :

    Je me reconnais tellement à son âge (et aujourd’hui …) que c’en est effrayant. Mes fils ne font pas d’hypocondrie pour l’instant, j’espère que ça ne se développera pas plus tard, en tout cas je fais tout pour leur éviter les crises d’angoisse qui ont jalonné mon enfance, mon adolescence et aujourd’hui ma vie d’adulte. Je n’ai malheureusement pas eu la chance que mes parents soient suffisamment informés sur les spécificités des zèbres, et ai été confrontée très tôt à des paroles et des images qui ont fourni un terreau très fertile à mon hypocondrie et mes peurs de la mort et de la maladie. Le bon côté étant que je fais aujourd’hui très attention à ce que je dis devant mes enfants pour ne pas les inquiéter.
    Le meilleur conseil qui m’ait été donné pour gérer ce bouillonnement débordant lors des crises d’angoisse, cette succession de scénarios tous plus affolants les uns que les autres, c’est de faire du sport de manière assez intense. Le fait d’équilibrer l’activité cérébrale et l’activité physique permet de ralentir et diminuer un peu la montée de stress. Ce n’est pas magique, mais ça aide. Eviter aussi tout ce qui est excitant, la caféine, le sucre en trop grande quantité… qui ne font qu’affoler les compteurs d’un moteur qui tourne déjà trop vite.



:) :-D 8) :oops: :( :-o LOL :-| :-x :-P :-? :roll: :smile: more »

Répondre à Nuances