« Tout le monde ment » : Google révèle nos recherches secrètes  (Les Echos, juillet 2017)

Un petit article plutôt amusant ce matin, paru sur le site du journal de l'actualité économique, financière & boursière Les Echos :)

 

Le titre est clin d’œil au médecin fictif le plus célèbre du globe : le Dr Gregory House :roll:

 

« Tout le monde ment » est la devise du diagnosticien misanthrope ! Il la répète à longueur de temps, souvent pour justifier tant des méthodes peu conventionnelles qu'une attitude peu élégante vis à vis des patients qui ne sont à ses yeux que des cas, plus ou moins intéressants :-P

 


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Bref, Leila Marchand a donc repris cette phrase dans son article : Tout le monde ment : Google révèle nos recherches secrètes ;)

 

Le papier pourrait être seulement amusant, mais il est aussi très révélateur.

 

De l'attitude des internautes, mais plus encore, des stéréotypes très ancrés dans la tête des gens, & là, nous tombons sur le thème du blog : la douance :!:

 

Car oui, il y a une raison au partage ici (je n'ai pas juste trouvé l'article sympa... LOL ).

 

Voici un extrait de l'article :

 

Les milliards de recherches formulées en ligne en disent long sur les craintes secrètes et questions taboues des internautes. Un ex-data scientist de Google a analysé et synthétisé ces données.

Avec plus de trois milliards de requêtes formulées chaque jour dans sa barre de recherche, Google est une véritable mine d'or pour les annonceurs. Mais aussi pour les chercheurs en sciences sociales, assure Seth Stephens-Davidowitz.

Cet ancien data scientist de Google - et désormais contributeur au New York Times - est convaincu que l'analyse des recherches des internautes révèle leurs questions les plus taboues, leurs opinions les plus embarrassantes. Véritable divan du XXIe siècle, Google « permet aux gens d'admettre des choses qu'ils n'admettraient nulle part ailleurs », écrit l'ancien de Google dans son livre "Everybody Lies: What the Internet Can Tell Us About Who We Really Are", dont des extraits ont été publiés cette semaine sur le Guardian.

[...]« Mon fils est-il surdoué ? », « Ma fille est-elle en surpoids ? »

Dans la catégorie des préjugés, d'autres peuvent être plus insidieux et avoir un impact tout aussi important : ceux des parents envers leurs propres enfants. A la question « est-ce que mon enfant est... », le mot arrivant à la suite est le plus souvent « surdoué », rapporte le data scientist.

Mais, ajoute-t-il, « les parents sont deux fois et demi plus susceptibles de demander "est-ce que mon fils est surdoué ?" que "est-ce que ma fille est surdouée ?" ». Pourtant dans les écoles américaines, les filles sont 9 % plus susceptibles que les garçons d'être intégrées dans des programmes pour surdoués.

Les préoccupations principales des parents américains à l'égard de leurs filles sont liées à l'apparence. Ceux-ci sont une fois et demi plus susceptibles de se demander si leur fille est belle que si leur fils est beau. De même, la question "est-ce que ma fille est en surpoids ?" est posée deux fois plus souvent que "est-ce que mon fils est en surpoids ?", alors même que l'obésité concerne aux Etats-Unis environ 28 % des filles contre 35 % des garçons.

 

 

POUR LIRE l'ARTICLE en INTÉGRALITÉ :arrow: c'est ici !

 

 

C'est intéressant à plus d'un titre :-?

 

Car cela nous permet de mesurer combien cette question de "l'enfant surdoué" (dans tout ce qu'il recouvre comme fantasmes) est importante pour les parents. Qui dit surdoué dit (dans l'imaginaire collectif) "études faciles", "grande réussite sociale", etc.

 

Voilà un extrait de mon livre "Les tribulations d'un petit Zèbre. Épisodes de vie d'une famille à Haut Potentiel Intellectuel" :

 

Il est depuis longtemps très mal vu en France de parler de « surdoué » , sujet brûlant s’il en est. Le seul mot, presque tabou, suscite instantanément de vives tensions : il gêne, vexe et suffit à créer un violent malaise dès qu’il est brandi. Mais il est aussi indéniablement un sujet fascinant, tant pour les journalistes que le grand public, devenu dans l’inconscient collectif objet fantasmagorique, comme en témoignent les tests qui pullulent sur internet (et n’ont bien entendu aucune valeur ni validité). Il faut cependant reconnaître que ces innombrables promesses de « calcul online de QI » répondent à un rêve inavouable, que beaucoup nourrissent en leur for intérieur, associant dans une vision romanesque le haut potentiel intellectuel à une réussite facile et sans effort ; en un mot : idyllique.

Extrait des Tribulations d'un Petit Zèbre

 

 


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Nous sommes dans l'illustration parfaite de cette ambivalence du grand public quant à la notion (caricaturale) de surdouement :-|

 

Mais aussi parce que cette analyse va dans le sens de ce qui est observé partout : à savoir une surreprésentation de la gent masculine en matière de (T)HPI. On la retrouve dans les cabinets psychologiques (pour les bilans visant à mettre en lumière ce haut potentiel intellectuel, comme pour les suivis), dans les associations (de parents d'EIP, comme d'adultes surdoués), mais aussi (en France en tous cas) dans les classes ou les écoles qui leur sont dédiées.

 

On a toujours à peu de choses près la même proportion qui revient : pour 10 enfants (T)HPI, 7 sont des garçons, 3 seulement sont des filles. Alors même que l'on sait que statistiquement, il n'y a pas de déséquilibre.

 

Les filles sont moins identifiées, moins suivies, moins repérées. C'est ce que souligne Doris Perrodin, auteure de l'excellent "Et si elle était surdouée" :up:

 

Et si elle était surdoué ? de Doris Perrodin-Carlen
Cliquez sur la couverture pour ouvrir
les détails de "Et si elle était surdouée

 

 

J'avais tenu à Aix les Bains une conférence avec Doris sur le thème des filles & femmes atypiques : elle parlant de la gent féminine dans le monde de la douance, & moi dans la sphère du syndrome d'Asperger :)

 

C'est une question qui me touche particulièrement, & à laquelle je crois qu'il faut vraiment sensibiliser les parents qui, comme on le perçoit très clairement par ces données de l'article des Echos, sont les premiers à avoir ces préjugés :(

 

( :idea: à ce propos une nouvelle conférence sur les filles & femmes, de Doris & moi-même, se tiendra d'ici quelques mois en Suisse :-D
Mais je vous en reparlerai le moment venu)

 

Autre point soulevé par ce papier, qui explique là encore bien des choses dans la suradaptation des filles & femmes, tant côté (T)HPI que syndrome d'Asperger : le poids des apparences. Et notamment, l'image renvoyée par cette fille ou cette femme qui serait non-conforme à la norme.

 

L'éloignement est plus critiqué, plus sanctionné parmi la population féminine que masculine :down:

 

On le sait (de très nombreux travaux l'ont démontré en psychologie sociale), les filles font bien plus d'effort pour se normaliser, & y parviennent d'ailleurs bien mieux. Quitte à ne pas dire lorsque ça ne va pas, à taire leur souffrance ou leurs difficultés, là où les garçons vont très vite l'exprimer.

 

Il en a encore été question récemment dans une interview de Virginie Despentes donnée au Monde ( :arrow: « Cette histoire de féminité, c'est de l'arnaque ») dans laquelle elle évoquait une étude à base de yaourts salés. Qui est en réalité une expérience pour une émission télévisée espagnole (les détails sont à retrouver par là).

 

Mine de rien cette tendance aux recherches axées sur l'apparence de la progéniture féminine (& en l'occurrence, son surpoids éventuel) vs celles axées sur l'intelligence de la progéniture masculine est tout à fait conforme aux stéréotypes de genre 8-O

 

Même s'il demeure regrettable, cet élan naturel du plus grand nombre à attribuer des comportements, qualités, des défauts, des postures selon le sexe, est le modèle dans lequel nous avons nous-mêmes grandi & dans lequel grandissent encore nos enfants :oops:

 

Mais en fin de compte, est-ce si amusant que cela ?
Personnellement, je trouve cela triste...

 

 

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